COMMENT DEMARER UN BAC RECIF

 

Une lente maturation obligatoire

 

Le problème du démarrage d'un nouvel aquarium récifal et de l'introduction des premières espèces animales se pose que l'on soit débutant ou confirmé en aquariophilie marine. Si il est un domaine où la patience et la sagesse de l'aquariophile sont les deux vertus indispensables, c'est bien dans l'élaboration d'un bac récif équilibré.

Il existe autant de manières de mettre en route un bac récif que de variétés d’aquariums. En fait ce qui est important ne sont pas les moyens mais les résultats obtenus. On sait depuis longtemps que des aquariophiles pratiquant différentes méthodes de maintenance arrivent souvent aux mêmes résultats. En somme, on pourrait se passer de toutes ces querelles d’école si elles n’avaient pas un grand avantage : celui de stimuler les esprits et d’arriver ainsi à des résultats qui, il y a encore quelques années, étaient du domaine imaginaire. Et il reste encore de nombreuses interrogations. Si la maintenance d’Acroporas est maintenant possible, il reste encore des espèces à problèmes. Le genre Goniopora, par exemple, garde encore tout son mystère. Il survit dans le bac, et les cas de croissances restent rarissimes. C’est pourquoi il est particulièrement important de ne pas mettre la charrue avant les bœufs.

La meilleure des solutions reste de se laisser guider par l’état de son bac et de faire ses armes sur des espèces robustes. La mise en route Un bac marin met longtemps à s’équilibrer en raison de la complexité même de l’eau de mer. On a pour habitude de concevoir que c’est plus long qu’en eau douce. En fait tout dépend des techniques de mise en place utilisées. La solution la plus classique consiste à faire vieillir de l’eau de mer synthétique, en la brassant quelques jours. Il n’y a pas plus agressif que l’eau de mer fraîchement préparée ! On y ajoute ensuite des roches vivantes puis le sable corallien. Un ensemencement supplémentaire avec du sable, des masses filtrantes ou des pierres d’un autre bac bien équilibré est un plus. Dans ce cas, il est bien évident que les différents maillons de la chaîne d’épuration et la stabilité du milieu physico chimique, vont s’établir dans des conditions optimales. Néanmoins, ne soyons pas prétentieux. Des aquariophiles démarrent en eau de mer naturelle et en roches vivantes. D’autres utilisent la méthode du Dr Vast : ensemencement en matière organique putréfiée et premier peuplement de crustacés comme des crabes tourteaux. Lorsque ces techniques (la liste est loin d’être exhaustive) sont bien maîtrisées et surtout lorsque l’aquariophile expérimenté a le coup d’oeil juste, pour savoir comment évolue son bac, ces méthodes sont valables. Dans le cas contraire, il vaut mieux se référer au premier exemple avec de roches vivantes et de l'eau de mer reconstituée.

On recherche dans un premier temps, la mise en place de la salubrité du milieu c’est à dire l'établissement complet du cycle de l’azote ( ammoniac * nitrites* nitrates ). La tâche est ardue car selon l’ensemencement, donc l’état des pierres vivantes, la ou les fameuses poussées de nitrites passent inaperçues. Lorsque les déchets organiques sont importants on peut constater à l’aide des tests aquariophiles des poussées d’ammoniac puis de nitrites et enfin de nitrates. Un brassage de l’eau puissant aide le travail des bactéries oxydatrices qui vivent en aérobiose. Inversement les zones où l’eau ne circule pas : intérieur des roches poreuses, sable dans le cas d’un système jaubert, favorisent la colonisation des bactéries anaérobies dénitrificatrices. Un équilibre entre les deux est nécessaire. Tous les sens de l’aquariophile sont nécessaires, il faut constater visuellement la clarté de l’eau et les apparitions d’algues. A l’odeur, on peut repérer une surcharge de déchets que les bactéries ne parviennent pas à traiter. Enfin ,on peut toucher le décor et les vitres qui se recouvrent progressivement d’un biofilm. Rappelons que les tests ne sont que des indicateurs, c’est à l’aquariophile d’interpréter. L'apparition d'algue brune indique une surcharge en silicates du milieu que les algues vont consommer. Elles disparaîtront au fur et à mesure. La présence de timides plaques vertes, rouges et roses correspondent à la croissance d'algues désirées et donc signifie que l'aquarium commence à s'équilibrer.

La stabilité physico chimique du milieu est incontestablement le second facteur important. En effet l’établissement des pouvoirs tampons de l’eau met parfois plusieurs mois à s’optimiser. On assiste à un phénomène de spoliation des ions calcium et magnésium en introduisant du sable calcaire neuf. Cela se stabilise avec la formation du biofilm. D’autres part, le travail des bactéries consommatrices d’oxygène induit parfois une acidification du milieu qui se traduit par des baisses de PH intempestives et très variables. C’est pourquoi non seulement on attend, mais en plus on va introduire au compte goutte les divers animaux dans le bac récifal, afin de perturber le moins possible le fragile équilibre en formation.

Le premier peuplement Les espèces détritivores et végétariennes sont les bienvenues. Gastéropodes : Astrea, Turbo, Diodora, Cerithium, Cypraea. Crustacés : Paguristes cadenati, Clibanarius versicolor et tricolor et même les crabes récif et les Alpheus présents dans les pierres vivantes. Holothuria edulis accomplit un fantastique travail contre la sédimentation. Les Polyplacophores (chitons) luttent contre les algues comme les diatomées et surtout préviennent et combattent les planaires rouges Convolutriloba retrogemme. Les Ophiures et les vers tubicoles prospèrent et consomment les éléments organiques excédents. A moins de vouloir créer un bac récif spécifique aux coraux hermatypiques, il vaut mieux introduire des alcyonnaires pour commencer. Néanmoins il faut peupler avec circonspection car ces invertébrés prennent beaucoup d’ampleur et risquent de gêner les futurs coraux. Toutes ces espèces vivent une période d’adaptation lorsqu’on les installe dans un nouveau bac. Les Sarcophytons mettent 3 ou 4 jours à sortir leurs polypes, par exemple. Leur aspect général va se transformer suivant la force des courants et l’intensité lumineuse, bien avant que commence la croissance proprement dite. Durant cette période, il est fortement déconseillé de déplacer en permanence ses animaux à moins d’une grosse erreur de départ. Ce qui aurait pour effet de les stresser et de les affaiblir.

Tout va bien : le premier peuplement s’est bien acclimaté et les éventuelles poussées d’algues jugulées, et si de plus des algues coralliennes encroûtantes roses parsèment le décor auparavant dépourvu, on peut commencer à introduire les premiers coraux durs. A ce sujet, la famille des Caryophyllidés est à privilégier. Les genres Plerogyra, Catalaphyllia et Euphyllia sont des espèces suffisamment robustes pour supporter quelques petits écarts de maintenance. Ensuite, on fait son choix parmi les genres Caulastrea, Blastomussa, Turbinaria, Trachyphyllia et Favia. Ces Coraux durs proviennent le plus souvent d’Indonésie et doivent vous être fournis avec CITES et factures. Ce sont en quelques sortes les papiers d’identité de vos animaux. Ainsi vous pouvez les déplacer et même les exposer en toute légalité.

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